Virginie Franqueza

A l’origine…

Au printemps 2008, lors des Journées Des Doulas, sous l’impulsion de deux femmes « mères veilleuses », pour la première fois en France une tente rouge a été montée. Sous cette tente, des dizaines de femmes se sont succédé. J’ai eu le privilège d’en faire partie. Nous avons toutes vécu une expérience unique, intense.

Là, nous avions la possibilité de nous livrer dans un cadre à la fois sûr et réconfortant. Un endroit qui inspirait confiance.

Je me souviendrai toujours de cette superbe structure artisanale faite de tissus savamment tendus, recouvrant les murs et le plafond de la pièce. Les voilages retombant voluptueusement tamisaient le seul rai de lumière qui pénétrait par un puits perçant le plafond. On avait une impression de contenance, d’être lovées.

Une vague mémoire utérine se rappelait à nous… nous étions bien là sous la tente. Le temps y suspendait sa course frénétique, et le décor rompait tellement avec le quotidien, que nous avions l’impression d’être subitement arrivée dans un ailleurs, loin, très loin de notre présent.

Et ce n’était pas innocent car le concept de la tente rouge est inspiré d’un roman intitulé « La tente rouge » (ou « La fille de Jacob », selon les éditions), d’Anita Diamant, qui relate l’aventure antique de Dina, fille de Jacob, oubliée des textes bibliques.

En ces temps anciens, la tente rouge était l’espace privé des femmes, un lieu privilégié pour vivre en sécurité leurs menstrues, leurs nubilités, leurs accouchements… les femmes y partageaient leurs secrets, se transmettaient leurs savoirs et leurs croyances. Malheureusement, l’histoire a fait tomber dans les oubliettes ce rituel féminin.

Les tentes d’aujourd’hui

Mais, pour notre plus grand plaisir depuis ce fameux printemps 2008, les tentes rouges réinvestissent des lieux en tout genre, et les femmes ont de nouveau un espace qui leur est dédié pour créer du lien autour de leur féminité.

De nos jours les tentes rouges sont des rencontres ritualisées. Sous une structure en tissu rouge, qui invite à la confidence, des femmes se réunissent pour partager un moment intime et chaleureux. L’ambiance, le décor sont autant d’invitation à vivre un moment unique, un moment pour soi, et parfois déposer ici ce qui ne peut l’être ailleurs.

Ce qui différencie une tente rouge d’une simple rencontre entre amies, outre le cadre dépaysant, c’est la prise de parole, qui s’opère sous le regard bienveillant de la facilitatrice (celle qui reçoit les autres femmes sous sa tente), et qui suit un certain code :

On pourrait croire que ce sont des principes fastidieux à suivre, pourtant ce sont précisément ceux-là qui permettent de faire émerger tout ce qu’il y a de beau en nous.

Lorsqu’on sait qu’on est ici et maintenant dans un endroit où il n’y a pas de place pour le jugement, on est plus libre d’être soi, en toute sincérité, avec à la fois nos forces, notre vulnérabilité, nos certitudes et nos doutes, nos joies comme nos peines. Et il est d’autant plus facile d’en parler qu’ici, on sait qu’on ne sera plus seules à les porter, au moins le temps d’une rencontre.

Mais ce qui est encore plus précieux à mes yeux, c’est lorsqu’on arrive à faire silence en soi pour accueillir la parole de l’Autre dans le respect le plus total de tout ce qui est partagé. On s’offre (à soi autant qu’à l’Autre) la possibilité d’expérimenter une palette d’émotions et de sentiments parfois méconnus jusque-là. Certaines femmes ressortent positivement bouleversées de ces rencontres.

C’est ce qu’on appelle la sororité (le féminin de fraternité). C’est ça la magie de la tente rouge. Et c’est cela que je viens chercher à chaque fois que j’entre sous une tente

Si vous souhaitez participer à une tente rouge près de chez vous, vous pouvez consulter le site www.tentesrouges.fr qui répertorie les différentes rencontres organisées en France.

Pour ma part, je propose des tentes rouges dans le cadre de mon partenariat avec l’association « les chouettes ateliers ». Retrouvez les prochaines dates de nos événements !